La panne numérique révèle les faiblesses de la société sans argent liquide

Le vendredi dernier, une panne mondiale de cybersécurité a entraîné une augmentation inattendue des retraits d'espèces au Royaume-Uni, avec 6 millions de livres sterling retirées aux distributeurs automatiques. Cette perturbation dans les paiements numériques a mis en évidence la vulnérabilité de la transition vers une société sans numéraire. Pour de nombreux adultes au Royaume-Uni, l'usage quotidien des espèces reste une nécessité familière. Au cours de l'année passée, le nombre de personnes utilisant principalement des espèces pour leurs dépenses quotidiennes a augmenté de manière inattendue de 66 %, une première en quatre ans. L'association bancaire UK Finance a publié ces chiffres la même semaine où la Financial Conduct Authority (FCA) a expliqué comment garantir l'accès aux espèces à l'avenir. Cela pourrait être un soulagement pour les consommateurs les plus pauvres et les plus âgés, qui sont les plus dépendants des espèces. Cependant, leur manque d'accès à la banque en ligne et à d'autres services numériques est un problème beaucoup plus important. Adrian Roberts, directeur général adjoint de Link, l'opérateur du réseau de distributeurs automatiques britannique, a souligné : "Le message principal est que nous ne sommes pas prêts à devenir une société sans numéraire tant que les paiements numériques ne seront pas entièrement robustes, fiables et accessibles à tous." Avec la disparition des agences bancaires traditionnelles - 6 000 ont été fermées au cours des neuf dernières années - le régulateur mise sur des hubs bancaires communs, dont 100 devraient être ouverts d'ici la fin de l'année ; 250 autres sont prévus. Ceux-ci permettent l'accès aux retraits et dépôts d'espèces, mais il manque des dispositions légales pour d'autres services bancaires, ce qui renforce l'exclusion numérique. UK Finance rapporte que 60 % de tous les adultes ont utilisé la banque mobile en 2023. Cela signifie également que 40 % ne l'ont pas fait. Les hubs bancaires offrent certes un contact direct avec différentes agences bancaires, mais les services limités frustrent les clients. Les préoccupations de sécurité liées aux connexions informatiques font que certains banquiers communautaires ne peuvent pas accéder aux données des clients sur leurs ordinateurs portables, et les clients doivent apporter leurs propres appareils. La gestion des finances en ligne comporte néanmoins des coûts. Il faut un smartphone ou une tablette compatible avec l'application de la banque. La "pauvreté en données" est un autre problème ; seuls 5 % des éligibles utilisent les tarifs sociaux – des forfaits mobiles et large bande moins chers pour les bénéficiaires de prestations. Pour les 13 millions de Britanniques ayant une compétence numérique très faible, dont la moitié a plus de 70 ans, il est évident pourquoi les plus pauvres de la société restent souvent dépendants des espèces - ce n'est pas nécessairement un choix conscient. Natalie Ceeney, présidente de Cash Access UK, estime que les banques collaborent volontairement pour surmonter les problèmes informatiques et offrir des services unifiés dans les hubs. Cependant, l'exclusion numérique entrave la capacité à gérer les finances et la vie en général. Cela inclut également le non-recours aux offres en ligne et aux méthodes de paiement innovantes. L'année dernière, un Britannique sur sept a utilisé le "Buy now, pay later" pour diviser un paiement important en plusieurs mensualités sans intérêts - une bouée de sauvetage pour ceux qui ont un budget serré. De même, l'exclusion numérique affecte l'accès aux services publics. Les prestations étatiques telles que le Universal Credit sont « digitales par défaut » ; ce qui explique en partie les 7,5 milliards de livres estimés qui ne sont pas réclamés chaque année. Les lignes d'assistance téléphonique sont souvent chroniquement sous-staffées. HM Revenue & Customs veut numériser l'impôt, mais au cours des années fiscales 2022-23, les contribuables ont passé l'équivalent de 800 ans en attente. La panne de cybersécurité de la semaine dernière a également provoqué des perturbations dans le système de santé britannique. La plupart des cabinets de médecins généralistes privilégient les prises de rendez-vous en ligne et offrent des méthodes pratiques pour obtenir les résultats de tests et les renouvellements d'ordonnances. Cependant, les personnes exclues numériquement doivent se fier à un système moins efficace. La perte récente de mon smartphone m'a fait réaliser à quel point la connectivité numérique est devenue normale. Je ne pouvais pas commander un taxi, vérifier mes courriels en déplacement ou savoir si la ligne Central fonctionnait. Cela peut sembler trivial, mais l'impact profond sur ma capacité à gérer mon quotidien a été une expérience révélatrice. Les désavantages éducatifs et économiques pour ceux qui n'ont pas de compétences numériques suffisantes ou de moyens financiers sont toutefois beaucoup plus sérieux. Après le déboire de CrowdStrike, la situation peut revenir à la normale, mais pour des millions d'adultes au Royaume-Uni, la panne numérique persiste.