Le patron de Nvidia, Jensen Huang, a discuté vendredi à la Maison-Blanche avec le président américain Donald Trump de l'avenir de l'intelligence artificielle et de l'industrie des semi-conducteurs. La réunion, prévue avant l'annonce du modèle révolutionnaire d'IA de DeepSeek, met néanmoins en lumière l'inquiétude croissante de Washington face aux progrès technologiques de la Chine.

La publication du nouveau modèle d'IA de DeepSeek au début de la semaine a fait sensation dans le monde entier. La start-up chinoise affirme avoir développé une IA compétitive avec seulement une fraction de la puissance de calcul des entreprises américaines comme OpenAI ou xAI. Le marché a réagi immédiatement : Nvidia, jusque-là un des plus grands bénéficiaires du boom de l'IA, a perdu presque 600 milliards de dollars de valeur boursière en une seule journée.

Trump a utilisé la rencontre avec Huang pour réaffirmer sa ligne de politique économique. Il a qualifié Huang de « gentleman remarquable » devant les journalistes et a annoncé que les États-Unis imposeraient des tarifs sur les puces informatiques. On ignore si cela a été spécifiquement discuté lors de l'entretien. Le même jour, Trump avait cependant déjà annoncé un ensemble complet de nouvelles restrictions commerciales visant les principaux partenaires économiques des États-Unis.

Alors qu'Nvidia a publiquement souligné avoir discuté avec Trump de la « politique des semi-conducteurs et de l'IA », la pression monte à Washington pour renforcer encore les contrôles à l'exportation. La question de savoir comment DeepSeek a pu se procurer ses puces Nvidia est particulièrement au centre de l’attention. Le gouvernement américain enquête actuellement pour savoir si la filiale singapourienne de Nvidia a été un point de contournement pour les restrictions à l'exportation américaines. Singapour a rejeté ces spéculations, affirmant travailler en étroite collaboration avec les autorités américaines.

Depuis 2022, le gouvernement américain a progressivement élargi les restrictions à l'exportation de puces IA performantes vers la Chine. Nvidia a ensuite développé des versions adaptées de ses processeurs pour le marché chinois, mais a tout de même réalisé un chiffre d'affaires de 11,6 milliards de dollars avec des clients chinois au cours des neuf premiers mois de l'année dernière. L'entreprise avertit depuis longtemps que des contrôles à l'exportation plus stricts pourraient à long terme renforcer l'industrie des semi-conducteurs de la Chine au lieu de l'affaiblir.

DeepSeek affirme avoir formé son modèle d'IA avec seulement 2 000 processeurs graphiques Nvidia - pour une fraction du coût des concurrents occidentaux. Cependant, les analystes de SemiAnalysis estiment que DeepSeek et la société d'investissement associée High-Flyer ont un accès total à environ 60 000 puces Nvidia et ont dépensé à ce jour plus de 500 millions de dollars en matériel.

La dimension géopolitique de la rivalité technologique devient de plus en plus une question politique aux États-Unis. Le sénateur républicain Josh Hawley a déjà proposé une loi visant à interdire complètement l'exportation de technologie IA vers la Chine. Dans une lettre adressée au conseiller à la sécurité nationale Mike Waltz, des députés de premier plan ont demandé une « mise à jour fréquente et rigoureuse des contrôles d'exportation ».